mardi 17 août 2010

Aïcha et Fatima au pays des Berbères (suite)

Un peu en retard, voici nos dernières photos et histoires du Maroc.

Dans la vallée des Aït-Bougmez, nous avions rencontré deux Français qui habitaient au Maroc et qui y faisaient de la randonnée. Il nous restait 2 journées à remplir à la fin du voyage et nous ne savions pas exactement quoi en faire. Nous leur avons donc demandé conseil et ils nous ont suggéré un gîte en montagne dans la vallée de l'Ourika. Cette vallée est située à moins d'une heure de voiture de Marrakech. Nous avons donc contacté Rachid, le propriétaire et nous y sommes rendues en grand taxi.

Arrivées à Oulmès, un village de la vallée, nous avons rapelé Rachid pour qu'il vienne nous rejoindre. En effet, son village est situé dans la montagne et nous ne pouvions nous y rendre seules. Il nous dit "Je viens. Ca prendra entre 1h30 et 2h." Nous nous installons donc dans un petit casse-croûte et nous prenons une boisson gazeuse chacune. Il y a du trafic dans ce petit village! C'est que la vallée de l'Ourika est près de Marrakech et il y fait beaucoup moins chaud. Les gens y viennent prendre le frais et se baigner en famille. En regardant passer lentement les files de voiture, nous attendons. 1h, 1h30. Ah! Un homme avec une mule! Est-ce lui? On ne dirait pas... 2h, 2h30... C'est long! Aimée va rappeler. "Ah! Je viens. Attendez-moi là sans bouger." Ils ont un peu de mal à se comprendre au téléphone, car Aimée doit insérer une pièce chaque 15 secondes. Cling! Cling! Elle perd 3 mots chaque fois! On se fait regarder croche par le patron du casse-croûte, alors on va s'asseoir au bord de la route. 3h, 3h30. Aimée est découragée. Elle se demande si on s'est fait avoir. Doit-on chercher un hôtel? Ceux du coin ont l'air miteux! Retourner à Marrakech? Non! Devant son désespoir, je propose de rappeler. "Je suis vraiment désolé du retard. Je suis là dans 5 minutes. Je m'excuse, c'est parce que ..." Le téléphone coupe avant que je rajoute ma pièce. Tant pis, j'ai compris l'essentiel. 10 minutes plus tard, il arrive enfin!

Avant d'entamer la marche ver le village, Rachid achète un sandwich et un Coca-Cola qu'il partage avec nous au bord de la rivière. Il nous parle un peu de lui. Rachid est un jeune homme de 35 ans qui adore son village. Sa famille y habite depuis 12 générations! Il s'y est marié et a maintenant 3 enfants. Il est allé à l'école seulement 4 ans car, à cette époque, il fallait marcher très longtemps pour s'y rendre. Le reste, français inclus, il l'a appris par lui-même. Il est très taquin et aime particulièrement agacer Aimée! Il n'est pas guide de montagne officiel, mais il nous prouve son sérieux en nous demandant quelle eau nous buvons et en nous disant qu'il nous en ferait bouillir chez lui.

On charge la mule avec nos sacs à dos, puis on commence l'ascension vers son village appelé Tizi n'Oucheg. Ca nous prendra 1h30, mais les gens du village, eux, le font en 40 minutes. La lumière du soleil qui descend révèle un paysage magnifique, entre le rouge de la terre, le vert de la végétation et le bleu du ciel. Wow!


Sur cette photo, on voit une partie du village. Tizi en berbère signifie "col".








Aimée, qui a peu dormi et peu mangé, traîne les pieds. Elle manque cruellement d'énergie, mais arrive heureusement jusqu'au village où elle se repose pendant que je vais profiter du soleil couchant pour aller prendre mes photos!



Le batiment qu'on voit est la nouvelle école. En bas, on voit des champs cultivés.

Il faisait bon se balader dans ce village où bien peu de touristes mettent les pieds! C'était beau, serein. On entendait rire, chanter dans les champs. C'était un village vraiment vivant et accueillant! Tellement accueillant qu'on a décidé d'y passer une journée entière le lendemain pour qu'Aimée puisse se reposer.

Le soir, on a fait la connaissance de la femme de Rachid, Saadiya. On a aussi rencontré ses trois enfants: Fatimsaha 10 ans, Hemza 3 ans et Mariam 1an et demi. C'était une famille vraiment charmante!

Le lendemain matin, on a fait du lavage. Fatimsaha est venue nous montrer la rivière où les femmes lavent le linge et on s'y est installées. En riant de nous, des femmes nous ont montré comment faire comme elles. C'était rafraîchissant et un bon moyen d'entrer en contact avec ces femmes qui ne parlaient que le berbère! Plus tard, quand nous sommes allées nous balader, il y avait toujours quelqu'un pour faire un bout de chemin avec nous. Une fille de notre âge nous a aussi invitées à prendre le thé. A travers nos quelques mots berbères, leurs quelques mots français et les gestes, nous arrivions à une communication très basique avec de nombreux malentendus!

Le lendemain, nous sommes parties en excursion pour 2 jours avec Rachid et Hussein, un muletier. Nous avons gravi le plateau du Yagour, 900m de dénivelé. Avec la mule qui porte les sacs, c'est quand même beaucoup plus facile! La montée a été longue, mais nous l'avons prise à notre rythme et ça s'est très bien passé. Au sommet, nous avons traversé un endroit qui sentait fort l'encens. Je ne sais pas quelle était cette plante, mais la sensation d'être dans une église en pleine nature était spéciale! Arrivés au campement, Hussein nous a préparé un tajine pendant que nous montions les tentes. Nous nous sentions un peu mal à l'aise avec le luxe d'une tente cuisine, du muletier-cuisiner et du guide pour nous toutes seules, mais c'était quand même très agréable!

Après le repas, un orage est arrivé. Nous sommes allées nous réfugier sous des rochers de la falaise. Aimée s'est même endormie en écoutant la pluie...

Après l'orage, nous sommes allés explorer ce plateau. Les gens de Tizi n'Oucheg et de plusieurs autres villages y font paître leurs moutons et leurs chèvres durant l'été. On y trouve aussi des gravures rupestres du néolithique. Ce qui est particulier, c'est que les gravures anciennes en côtoient d'autres qui semblent beaucoup plus récentes... On pourrait en faire une nous aussi! Voici quelques photos.



Des cultures en étage en contrebas. Le lendemain, nous sommes redescendus entre ces champs.


Les fameuses gravures.

En passant près d'une bergerie (enclos fermé où ils mènent les bêtes la nuit), nous avons entendu Bêêê bêêê sans voir de chèvre. Rachid nous a dit que c'était des bébés trop jeunes pour sortir qui étaient cachés et qui attendaient leur maman. Nous avons demandé si nous pouvions aller les voir. Le berger est descendu dans l'enclos, est revenu avec les deux chevreaux et nous les a mis dans les bras. Il fallait voir le visage d'Aimée à ce moment!!! Elle semblait dire "Mais, mais qu'est-ce que je dois faire avec ça moi?"



Notre tente et la tente-cuisine sur le plateau. On voit aussi les chèvres qui rentrent à la bergerie pour la nuit.

Ce soir-là, nous sommes partis avec nos sacs de couchage jusqu'au bout de la falaise où nous nous sommes installés. Le halo de Marrakech et les lumières de la vallée étincelaient. La nuit révélait aussi tous les petits villages dans la montagnes dont les timides lueurs pouvaient être confondues avec les étoiles du ciel. Moment magique.

Le lendemain, nous sommes redescendus par un autre chemin. Nous sommes passés par une zone cultivée. Nous avons goûté au fruit du noyer, ce que nous appelons la noix de Grenoble. Mais elle était toute fraîche, cueillie dans l'arbre! Le goût et la texture sont très différents! Nous avons dîné au village (tajine de chèvre, Aimée n'a pas vraiment apprécié...), puis nous sommes reparties vers la vallée.



Rachid est venu avec nous jusqu'à Marrakech, car nous n'avions pas assez d'argent pour le payer (c'était prévu d'avance). En chemin, il nous a raconté comment sa femme a accouché de leur première fille. Pour le premier enfant, les femmes de son village vont au centre de santé dans la vallée. Mais comment descendent-elles dans la vallée? A dos de mule? Mais non, nous dit Rachid, c'est beaucoup trop long et ça brasse trop? Mais alors comment? Il tapote ses épaules. Quoi, pas sur ton dos? "Eh bien on prend deux poteaux de métal qu'on fait tenir ensemble avec de la corde, on les met sur nos épaules et on met la femme dessus. Après, on part à 10 hommes et on se relaie rapidement pour ne pas se fatiguer. Et on descend en ligne droite sans se préoccuper des zigzag du sentier. En 15 minutes, on est en bas!" Oulala! On comprend pourquoi les enfants suivants naissent à la maison!

Ce soir-là, on a invité Rachid à manger une crème glacée dans la chaleur accablante de Marrakech. On a été un peu tristes de le laisser partir. Puis, on a essayé de dormir. Le lendemain, on est parties tôt à l'aéroport pour profiter de l'air climatisé. C'est ainsi que s'est terminé notre séjour au Maroc après 28 jours.

Geneviève

2 commentaires:

  1. Vous m'impressionnez les filles. Je n'ai pas encore lu tous vos commentaires parce que j'ai découvert votre site il y a peu de temps (c'est Véro qui m'en a parlé). Je lui ai dit que vous écriviez bien. Des journalistes chevronné(e)s ne feraient pas mieux.

    Claire de Saint-Félix et de Cap Lumière

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  2. WOW!! Quelle belle fin de séjour au Maroc! Ce petit village et les randonnées dans les montagnes: ça devait être magique...
    Maman, XXX

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